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Paulette Sabrié est chargée de contentieux pour la SIGH à Valenciennes depuis 17 ans. Sa mission ? Les procédures à mettre en place en cas d’impayés de loyer.
Je suis entrée au service contentieux en 2012. Dans la plupart des cas, les locataires pensent que « contentieux » signifie procédure, tribunal, expulsion. Quand un dossier arrive dans mon service, c’est que toutes les tentatives menées par mes collègues du précontentieux ont échoué. Le locataire n’a pas donné suite, n’a pas joué le jeu ou n’a même pas répondu à leurs sollicitations. Mais quand on travaille chez un bailleur social, c’est que l’on a une fibre sociale : je suis passée par le terrain et mon parcours m’a enseigné qu’il y a toujours des choses à tenter. Un locataire orienté « procédure » reste une personne fragile. Je dois m’assurer que tous les outils à ma disposition ont été exploités, car tout locataire en difficulté est potentiellement une personne désespérée.
Je contacte les ménages concernés, je leur fixe rendez-vous et leur explique qu’ils ont encore une carte à jouer avant que je ne transmette leur dossier à un huissier de justice. Comme je me présente au titre du service contentieux, ils prennent conscience que c’est peut-être leur dernière chance.
La conjoncture actuelle est extrêmement difficile, je rencontre beaucoup de misère. Il y a parfois des gens de mauvaise foi qui cherchent à profiter du système, mais ils sont une minorité. Les locataires en situation d’impayés vivent des minima sociaux, ce sont des salariés qui n’ont droit à aucune aide ou, et c’est bien triste, des retraités qui ont travaillé toute leur vie et se retrouvent à découvert sans avoir fait le moindre excès. Ces derniers sont souvent très affectés, effondrés par ce qui leur arrive et submergés par une situation qu’ils jugent insurmontable. Il faut parfois deux ou trois rendez-vous pour qu’ils acceptent de se livrer. Je cherche avant tout à éviter les ruptures et ma plus grande victoire est de les voir repartir avec une confiance retrouvée, dans l’intérêt de tous.
En gagnant leur confiance et leur adhésion, je parviens à mettre en place des plans d’apurement, des aides… J’instruis des dossiers de Fonds de solidarité logement et, pour les dossiers avancés en procédure, j’instruis également des protocoles de la cohésion sociale. Je travaille avec les partenaires sociaux, les centres d’actions sociales, les unités territoriales du conseil général, les caisses de retraite…
J’ai un adage que je répète à l’envi aux locataires : « Vous êtes dans un bateau qui tangue, mais quoi qu’il advienne, ne quittez pas le navire, gardez le cap et vous arriverez à destination. »
Ma responsable sourit, mais elle me soutient, car les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2017, nous avons seulement procédé à 13 expulsions sur 4 800 ménages en impayés.